Évaluation du Programme des coordonnateurs des témoins de la Couronne - Avril 2024
Rapport final
Division de l’audit interne et de l’évaluation
Approuvé par la directrice des poursuites pénales le 24 avril 2024.
This publication is also available in English.
© Sa Majesté le Roi du chef du Canada, 2024
No de catalogue : J79-35/2024F-PDF
ISBN : 978-0-660-71657-2
Table des matières
- Évaluation du Programme des coordonnateurs des témoins de la Couronne
- Terms of Reference
- 1.0 Sommaire
- 2.0 Objectifs et portée de l’évaluation
- 3.0 Méthodologie
- 4.0 Nécessité du Programme des CTC
- 5.0 Réactivité et efficacité du Programme des CTC
- 5.1 Sensibilisation des victimes et des témoins quant à leurs droits et responsabilités
- 5.2 Participation des victimes et des témoins au processus judiciaire
- 5.3 Accès à des services qui répondent aux besoins des victimes et des témoins
- 5.4 Sensibilisation des droits et des besoins des victimes et des témoins chez les intervenants du système de justice pénale
- 5.5 Soutien au déroulement des poursuites
- 6.0 Gestion du Programme des CTC
- 7.0 Conclusion
- Annexe A – Roulement du personnel au sein du Programme des CTC
- Annexe B – Nombre d’années d’expérience du personnel du Programme des CTC
- Annexe C – Congés utilisés par le personnel du Programme des CTC
- Annexe D – Comptabilisation du temps chez les CTC
- Annexe E – Méthodologie
1.0 Sommaire
Le présent rapport fait état des constatations issues de l’évaluation du Programme des coordonnateurs des témoins de la Couronne (CTC) du Service des poursuites pénales du Canada (SPPC) en vigueur au Yukon, dans les Territoires du Nord-Ouest et au Nunavut. L’évaluation a porté sur les exercices financiers (EF) 2015-2016 à 2022-2023. Elle visait principalement à mesurer le rendement, la pertinence, l’efficacité et la conception du Programme.
L’évaluation a permis de constater que le Programme des CTC répond à un besoin véritable et vérifiable. Les victimes d’actes criminels font face à de nombreux obstacles à leur participation au système de justice pénale, et le Programme est conçu pour traiter certaines des difficultés qu’elles rencontrent. En outre, le Programme des CTC est en ligne avec les priorités et les objectifs du gouvernement du Canada et du SPPC, en particulier en ce qui concerne les objectifs visant à améliorer les services et le soutien aux victimes et à accroître la participation de celles-ci au processus de justice pénale.
Toutefois, la mesure des progrès réalisés par le Programme dans l’atteinte des résultats escomptés a posé des problèmes lors de l’évaluation. Plus précisément, l’évaluation a permis de constater des divergences dans les outils et les pratiques de collecte de données du Programme dans l’ensemble des régions. Des incohérences dans les données liées à la comptabilisation du temps ont également entraîné des difficultés à évaluer avec précision les charges de travail des CTC dans l’ensemble des régions.
Malgré ces limites, l’évaluation a permis de constater que les intervenants considèrent généralement que le Programme des CTC est important pour soutenir les victimes et les témoins. Les CTC jouent également un rôle clé en offrant du soutien aux avocats et dans le cadre du déroulement général des poursuites.
Dans l’ensemble, il y a des lacunes et des incohérences dans la collecte de données servant à mesurer les résultats du Programme et les charges de travail des CTC. De plus, le roulement continu du personnel dans le Programme et l’absence d’un processus normalisé d’intégration et de formation pour les CTC posent des risques opérationnels. Par conséquent, il est nécessaire d’apporter des changements à la conception et à la gestion du Programme pour améliorer la capacité du SPPC de surveiller les résultats concernant les CTC et d’en rendre compte, afin d’assurer une plus grande uniformité dans la prestation des services et dans les outils et pratiques de collecte de données dans l’ensemble des bureaux du ministère dans le Nord.
Les quatre recommandations qui suivent sont formulées en réponse aux constatations découlant de l’évaluation.
Problème nº 1 : Chevauchement avec les services aux victimes
Le programme bénéficierait d’une coordination accrue entre le Programme et les organismes fournisseurs de services aux victimes qui offrent certains services identiques. Bien qu’il existe d’importantes différences en ce qui a trait à leurs rôles et à leurs mandats, l’évaluation a révélé qu’il y avait un chevauchement des rôles des CTC et des organismes fournisseurs de services aux victimes et des services offerts par les deux parties. De plus, des éléments probants indiquent que les avocats interagissent directement avec les travailleurs des services aux victimes dans les dossiers dont ils sont chargés.
Dans certains cas, il y aurait également un chevauchement dans les efforts déployés par les CTC et les travailleurs des services aux victimes pour entrer en contact avec la clientèle, ce qui fait en sorte que certaines victimes sont contactées à la fois par un CTC et un travailleur des services aux victimes et reçoivent la même information.
Recommandation nº 1 : Le SPPC devrait travailler de concert avec les fournisseurs de services aux victimes dans les territoires afin de :
- clarifier leurs rôles et responsabilités respectives dans la prestation de services aux victimes et aux témoins;
- trouver des moyens de limiter le chevauchement et d’améliorer la coordination des services aux victimes et aux témoins.
Problème nº 2 et 3 : Collecte de données sur le Programme
Il est nécessaire de clarifier les attentes et les exigences en matière de collecte de données pour les CTC. En outre, il convient d’examiner les outils de collecte de données pour s’assurer qu’ils tiennent compte de tous les droits énoncés dans la Charte canadienne des droits des victimes (CCDV) et des obligations ministérielles et que ceux-ci soient aussi uniformes que possible dans les trois régions.
Les formulaires liés à la CCDV servent à de multiples fins, notamment à recueillir des données, à assurer une continuité dans les dossiers et à veiller à ce que le SPPC respecte la CCDV. Toutefois, l’évaluation a révélé des incohérences dans les formulaires liés à la CCDV dans l’ensemble des régions, tant dans leur utilisation que dans leur contenu. Plus précisément, les formulaires :
- ne sont pas utilisés de façon uniforme. Suivant un examen des dossiers dans iCaseNote de bas de page 1, plusieurs formulaires ne sont pas remplis ou sont manquants;
- ne recueillent pas tous les mêmes renseignements.
Par conséquent, il n’a pas été possible d’évaluer les résultats du Programme de façon systématique et quantitative en raison de la nature complexe de la collecte de données et des lacunes importantes relevées dans celles qui étaient disponibles.
Comme le SPPC développe présentement un nouveau système de gestion des dossiers juridiques (SGDJ) pour remplacer iCase, il conviendrait de s’assurer que ce nouveau système recueillera les données requises pour la supervision du Programme des CTC et la production de rapports. Ainsi, il sera possible d’améliorer l’efficacité et l’uniformité de la collecte et de l’analyse des données du programme.
Recommandation nº 2 : Le SPPC devrait examiner les pratiques et les outils en place en matière de collecte de données afin de :
- repérer les données nécessaires à la production de rapports sur le rendement du Programme;
- déceler les incohérences dans les formulaires liés à la CCDV, tout en tenant compte des différences régionales en ce qui a trait aux exigences, aux processus et aux besoins, et s’assurer que les formulaires sont uniformes d’une région à l’autre;
- s’assurer que les outils sont utilisés comme prévu et que les renseignements sont recueillis;
- limiter le dédoublement des données recueillies dans les formulaires de la CCDV, de même que celles recueillies à l’aide d’autres outils et dans le cadre d’autres processus.
Recommandation nº 3 : Compte tenu des limites et de l’inefficacité des outils et des processus de collecte de données actuels, le SPPC devrait s’assurer que les besoins en données du Programme seront pris en compte par le nouveau SGDJ.
Problème nº 4 : Formation
À l’heure actuelle, le Programme ne dispose d’aucun processus d’intégration normalisé à l’intention des nouveaux CTC. La formation des CTC qui se joignent au SPPC consiste principalement à lire un manuel et à observer un autre CTC. Toutefois, compte tenu du roulement élevé au sein du personnel du Programme, il y a un risque que certains CTC soient formés par des collègues ayant une expérience limitée à ce titre. Des données probantes portent à croire qu’il y a des incohérences dans la façon dont les employés effectuent leur travail, en particulier du point de vue de la gestion des dossiers et de la comptabilisation du temps. Plus précisément, l’évaluation a permis de constater des différences dans l’utilisation des formulaires de la CCDV et dans la comptabilisation du temps par les CTC dans les dossiers. Ainsi, les nouveaux CTC sont susceptibles d’être formés par des collègues qui ont adopté des pratiques qui ne correspondent ni au rôle ni aux attentes du poste. Par conséquent, le SPPC devrait établir un cadre pour orienter le processus d’intégration et de formation afin de s’assurer que tous les nouveaux CTC aient une expérience d’apprentissage semblable et que les CTC comprennent clairement leur rôle et les attentes à cet égard.
Recommandation nº 4 : Le SPPC devrait élaborer un plan d’intégration et de formation à l’intention des CTC afin de :
- veiller à ce qu’il y ait une compréhension claire et commune du rôle et des attentes des CTC;
- veiller à l’uniformité de l’expérience d’apprentissage de tous les nouveaux CTC.
2.0 Objectifs et portée de l’évaluation
Avant la présente évaluation, le Programme n’avait pas fait l’objet d’une évaluation exhaustive depuis plus de 13 ansNote de bas de page 2. La plus récente évaluation, effectuée en 2020, était axée sur la collecte de données et l’analyse des résultats pour cinq indicateurs de rendement du Programme des CTC. [CAVIARDÉ] L’évaluation visait à mesurer l’efficacité du Programme en se concentrant principalement sur son rendement [CAVIARDÉ]. L’évaluation n’a pas porté sur les questions de pertinence ou d’efficience du Programme et n’a pas tenu compte des incidences de la CCDV sur le mandat, la conception et l’exécution de celui-ci.
Dans le cadre de l’évaluation précédente, il s’est avéré difficile d’évaluer l’efficacité du Programme compte tenu d’importantes limites quant au nombre de données disponibles. Par conséquent, on recommandait, dans le rapport d’évaluation, que le SPPC élabore de nouveaux indicateurs pour suivre et mesurer le rendement du Programme des CTC. Des indicateurs de rendement ont donc été créés pour le Programme, et des efforts ont été déployés pour recueillir activement et systématiquement des données à des fins de mesure du rendement.
Le Programme a également fait l’objet d’un audit en 2020 visant à déterminer si les activités et les processus du Programme en place avaient aidé le SPPC à s’acquitter de ses obligations en lien avec la CCDV.
La présente évaluation, de nature sommative, avait pour but d’évaluer la pertinence et l’efficacité du Programme, y compris sa conception et son exécution. L’évaluation a porté sur les activités du Programme depuis la mise en œuvre de la CCDV, de l’EF 2015-2016 à l’EF 2022-2023.
L’évaluation visait à répondre aux questions suivantes :
Pertinence
- Dans quelle mesure le Programme des CTC répond-il a un besoin vérifiable?
- Dans quelle mesure le Programme des CTC concorde-t-il avec les priorités ministérielles et les priorités du gouvernement du Canada?
Réalisation des résultats escomptés
- Dans quelle mesure le Programme des CTC a-t-il permis d’informer davantage les victimes et les témoins sur leur rôle, leurs droits et leurs responsabilités dans le cadre du processus judiciaire?
- Dans quelle mesure le Programme des CTC a-t-il permis d’informer davantage les intervenants du système de justice pénale sur les besoins des victimes et des témoins?
- Dans quelle mesure le Programme des CTC a-t-il contribué à accroître la participation des victimes et des témoins au processus judiciaire?
- Dans quelle mesure les victimes et les témoins ont-ils accès à des services qui répondent à leurs besoins?
Efficacité
- Dans quelle mesure la conception actuelle du Programme des CTC permet-elle de fournir efficacement du soutien aux victimes et aux témoins?
Conception et exécution
- Dans quelle mesure les services fournis par le Programme des CTC répondent-ils aux besoins des victimes et des témoins?
- Dans quelle mesure la gestion du Programme des CTC est-elle efficace et adaptée?
3.0 Méthodologie
L’évaluation a été menée selon une approche par méthodes diverses en tenant compte des sources de données quantitatives et qualitatives suivantes :
- Analyse documentaire
- Entrevues avec des informateurs clés
- Analyses sectorielles
- Sondage auprès des avocats du SPPC
- Sondage auprès de membres de la Gendarmerie royale du Canada (GRC)
- Analyses de données administratives extraites notamment de PeopleSoft, d’iCase et du Système intégré de gestion financière du SAP
- Examen de dossiers
D’autres détails sur la méthodologie d’évaluation se trouvent à Annexe E.
4.0 Nécessité du Programme des CTC
Constatation nº 1 : Il est nécessaire de fournir des services et du soutien aux victimes et aux témoins d’actes criminels, notamment d’offrir du soutien et des renseignements dans le cadre du processus judiciaire.
4.1 Criminalité et victimisation dans les territoires
Les régions desservies par le Programme présentent les plus hauts taux de criminalité et de victimisation au Canada. En 2021, les Territoires du Nord-Ouest, le Nunavut et le Yukon avaient les taux de criminalité les plus élevés pour toutes les infractions prévues au Code criminelNote de bas de page 3. De plus, les taux de criminalité dans les territoires ont augmenté de 43 % au Nunavut, de 13 % dans les Territoires du Nord-Ouest et de 11 % au Yukon entre 2011 et 2021Note de bas de page 4. L’Indice de gravité de la criminalité (IGC) au CanadaNote de bas de page 5 pour chacun de ces trois territoires était le plus élevé au Canada entre 2011 et 2021Note de bas de page 6.
Version textuelle
Région | 2012 | 2013 | 2014 | 2015 | 2016 | 2017 | 2018 | 2019 | 2020 | 2021 | 2022 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Territoires du Nord‑Ouest | 3467 | 3263 | 3041 | 3400 | 3485 | 3782 | 3888 | 4980 | 5248 | 5516 | 5621 |
Nunavut | 3390 | 3098 | 3041 | 2939 | 3029 | 3117 | 3384 | 4300 | 4813 | 4762 | 5027 |
Yukon | 1458 | 1525 | 1663 | 1539 | 1547 | 1470 | 1587 | 2089 | 2155 | 2196 | 2264 |
Source : Statistique Canada (2023). Tableau 35-10-0177-01 Statistiques fondées sur l’affaire, par infractions détaillées, Canada, provinces et territoires, régions métropolitaines de recensement et Police militaire des Forces canadiennes. Le document se trouve à l’adresse suivante : https://www150.statcan.gc.ca/t1/tbl1/fr/tv.action?pid=3510017701&request_locale=fr
En ce qui concerne la victimisation criminelle, les taux les plus élevés de victimisation avec violence au Canada en 2019 (y compris les incidents d’agression sexuelle déclarés par la victime, les vols qualifiés et les voies de fait)Note de bas de page 7 ont été enregistrés au Nunavut, suivi par les Territoires du Nord-OuestNote de bas de page 8.
4.2 Obstacles à la participation des victimes et témoins au système de justice pénale
La participation au système de justice pénale peut exiger beaucoup d’efforts et de ressources de la part des victimes et des témoins, notamment des congés de travail, un moyen de transport et des services de garde d’enfantsNote de bas de page 9. Le statut socioéconomique d’une personne, ainsi que les barrières culturelles et linguistiques, peuvent également constituer des obstacles à la participationNote de bas de page 10. De plus, les victimes et les témoins peuvent éprouver de la peur, de la confusion et de l’incertitude lorsqu’ils s’engagent dans un système inconnu et hautement techniqueNote de bas de page 11.
Toutefois, lorsque les victimes participent, on constate régulièrement des manquements dans la satisfaction de leurs besoins, y compris des lacunes dans la manière dont les autorités les tiennent informéesNote de bas de page 12. Lorsque les victimes ne reçoivent pas l’information pertinente en temps opportun, elles risquent de manquer l’occasion :
- de participer à une audience;
- d’exprimer leur point de vue sur une décision dans leur dossier;
- de soumettre une déclaration de la victime (DV);
- de faire part de leurs préoccupations par rapport à leur sécuritéNote de bas de page 13.
En effet, des études ont montré que l’accès à l’information et le fait d’être tenu informé sont des facteurs importants en ce qui a trait à la satisfaction des victimes à l’égard du processus de justice pénaleNote de bas de page 14.
4.3 Harmonisation avec les priorités ministérielles et gouvernementales
Constatation nº 2 : Le Programme des CTC est bien harmonisé avec les priorités et objectifs du gouvernement du Canada et du SPPC pour ce qui est d’offrir un meilleur soutien aux victimes d’actes criminels et de contribuer à accroître leur participation au système de justice pénale.
Stratégie fédérale d’aide aux victimes
La Stratégie fédérale d’aide aux victimes (SFAV) a été créée en 2000 et a depuis permis de coordonner les initiatives du gouvernement du Canada à l’appui des victimes d’actes criminels. La Stratégie relève du ministère de la Justice et mobilise différents ministères fédéraux, dont le SPPC. La Stratégie a pour objectif de s’assurer que les victimes d’actes criminels puissent avoir accès à la justice et participer pleinement au système de justice pénaleNote de bas de page 15.
Charte canadienne des droits des victimes
Le projet de loi C-32, la Loi sur la Charte canadienne des droits des victimes, que l’on appelle communément la Charte canadienne des droits des victimes, ou la CCDV, a été déposé le 23 juillet 2015. L’adoption de la CCDV a permis de garantir pour la première fois des droits aux victimes d’actes criminels à l’échelle fédérale.
La CCDV énonce les droits des victimes dans les quatre principaux domaines suivants, notamment :
- Droit à l’information : les victimes ont le droit d’obtenir des renseignements en ce qui concerne le système de justice pénale, les services auxquels elles ont accès, l’enquête et les procédures, le délinquant et l’accusé, ainsi que la procédure à suivre pour déposer une plainte.
- Droit à la protection : les victimes ont le droit à ce que leur sécurité soit prise en considération et à être protégées contre l’intimidation et les représailles, ainsi que le droit à la vie privée, à la confidentialité de son identité et à des mesures visant à faciliter son témoignage.
- Droit de participation : les victimes ont le droit à ce que leur point de vue soit pris en considération dans le cadre du processus de justice pénale, et le droit de présenter une déclaration.
- Droit au dédommagement : les victimes ont le droit de demander au tribunal d’envisager la prise d’une ordonnance de dédommagement contre le délinquant.
L’adoption de la CCDV a entraîné la création d’obligations pour les entités fédérales qui participent au système de justice pénale, y compris pour le SPPC, en ce qui concerne le respect des droits des victimes prévus par la loi.
Politique du SPPC sur les victimes d’actes criminels
Le procureur général du Canada et le SPPC ont élaboré des directives qui porte spécifiquement sur la conduite des procureurs et des CTC dans leurs interactions avec les victimes. Chapitre 5.6 du Guide du SPPC, une Directive du procureur général, décrit les droits des victimes tels qu’ils sont énoncés dans la CCDV et fournit des directives sur les rôles et les responsabilités des procureurs de la Couronne et des CTC dans le cadre de leur travail auprès des victimes. Chapitre 5.5 du Guide, une ligne directrice de la directrice du SPPC, traite également du rôle des CTC, plus précisément dans les affaires de violence conjugale.
4.4 Chevauchement des services aux victimes
Constatation nº 3 : Il y a un chevauchement des rôles des CTC et des fournisseurs de services dans les territoires.
Des entrevues et des examens de documents et de sources en ligne ont révélé qu’il y a un chevauchement des services offerts par les CTC et les services aux victimes dans les territoires. Plus précisément, les deux parties fournissent les services suivants :
- communication de renseignements sur le processus judiciaire et l’évolution des dossiers;
- préparation des victimes au procès;
- communication de renseignements sur les droits de victimes, notamment sur la CCDV;
- accompagnement des victimes au tribunal;
- aiguillage vers des services communautaires;
- communication de renseignements sur la déclaration de la victime (DV) et aide à la rédaction à cet égard.
Ce chevauchement a également été souligné par le gouvernement des Territoires du Nord-Ouest dans le cadre d’une évaluation de son programme de services aux victimes menée en 2021. L’évaluation a montré qu’il y avait un chevauchement entre le travail des fournisseurs de services aux victimes et celui des CTC dans le bureau régional des Territoires du Nord-Ouest (BRTNO) en soulignant que [traduction] « le chevauchement des services est susceptible de créer une confusion chez les clients, qui pourraient ne pas savoir à qui s’adresser, et d’engendrer de la frustration chez certains fournisseurs »Note de bas de page 16.
Non seulement y a-t-il un chevauchement des types de services fournis, mais les informateurs clés interrogés dans le cadre de la présente évaluation ont souligné qu’il y a également un chevauchement dans les efforts déployés pour joindre les victimes et qu’il pouvait y avoir un manque de coordination dans certains cas. Par exemple, il est possible que :
- les travailleurs des services aux victimes et les CTC tentent de communiquer avec la même victime;
- les travailleurs des services aux victimes communiquent directement avec un avocat pour obtenir de l’information au nom des victimes, dans certains cas;
- les victimes reçoivent des mises à jour sur leur dossier à la fois de la part d’un CTC et d’un travailleur des services aux victimes;
- les travailleurs des services aux victimes et les CTC soient présents au tribunal au même moment.
En outre, d’autres données portent à croire que les avocats interagissent directement avec les travailleurs des services aux victimes prenant part aux dossiers dont ils sont chargés. Presque tous les répondants au sondage mené auprès des avocats (90 %) indiquent que des travailleurs des services aux victimes prennent part aux dossiers dont ils sont chargés, et 89 % des répondants ont précisé qu’ils interagissent directementNote de bas de page 17 avec les travailleurs des services aux victimes.
Malgré ce chevauchement, il convient de souligner certaines distinctions dans les rôles et les mandats des CTC et des travailleurs des services aux victimes. Par exemple, les CTC sont les mieux placés pour fournir des renseignements plus précis et en temps opportun sur les affaires portées devant le tribunal. Cependant, le soutien offert par les CTC se limite au processus judiciaire, soit du dépôt d’accusations jusqu’à la détermination de la peine. D’un autre côté, les organismes fournisseurs de services aux victimes sont présents à toutes les étapes du système de justice pénale et peuvent fournir un soutien immédiat aux victimes tout au long du processus judiciaire, soit avant que des accusations soient déposées, durant le processus judiciaire et après que les affaires judiciaires ont été réglées. De plus, les fournisseurs de services aux victimes peuvent d’offrir du soutien émotionnel à leurs clients et de défendre leurs droits car, contrairement aux CTC, ils ne sont pas liés par les obligations relatives au devoir de divulgation. Les informateurs clés ont également souligné que les programmes de services aux victimes dans les territoires sont sous-financés et manquent de ressources et, par conséquent, les CTC jouent un rôle essentiel en comblant les lacunes dans les services aux victimes.
Pour régler les questions de chevauchement des rôles des travailleurs des services aux victimes et des CTC, le bureau régional du Yukon (BRY) du SPPC a conclu un protocole d’entente en 2018 avec le ministère de la Justice du Yukon afin de :
- définir les rôles et responsabilités des CTC et des travailleurs des services aux victimes;
- décrire les procédures de gestion des dossiers dans les cas où les travailleurs des services aux victimes et les CTC travaillent auprès de la même victime.
Cependant, les entrevues ont révélé que les procédures décrites dans le protocole d’entente n’ont pas été systématiquement suivies au cours des dernières années, certains informateurs clés mentionnant que les exigences liées aux charges de travail des deux partenaires constituaient les principaux obstacles au respect du protocole d’entente. Par conséquent, les travailleurs des services aux victimes n’ont peut-être pas toujours pris l’initiative d’informer les CTC qu’ils avaient été en contact avec une victime, et inversement, ce qui a fait en sorte que des victimes ont continué de recevoir de l’information de la part des deux parties dans certains cas.
Recommandation nº 1 : Le SPPC devrait travailler de concert avec les fournisseurs de services aux victimes dans les territoires afin de :
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Réponse de la direction :
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5.0 Réactivité et efficacité du Programme des CTC
Constatation nº4 : Même si les outils de collecte de données du Programme des CTC sont conçus pour recueillir de l’information sur les résultats de ce dernier, des incohérences dans les pratiques de collecte de données et dans la conception d’outils font en sorte qu’il est difficile d’évaluer les résultats de façon systématique et quantitative.
Durant l’évaluation, il a été difficile d’obtenir des données sur la prestation des services du Programme. Bien qu’une analyse des données d’iCase ait montré que les CTC pourraient avoir fourni des services à 13 718 victimesNote de bas de page 18 au cours des huit dernières années, les données sur le nombre de tentatives de contact et de contacts réussis avec les victimes, ainsi que sur le nombre et les types de services fournis n’étaient pas disponibles. Pour compléter l’analyse des données d’iCase, un examen des dossiers a été effectué pour analyser un échantillon des formulaires liés à la CCDVNote de bas de page 19 dans les trois régions et pour recueillir de l’information sur les services fournis aux victimes.
Des difficultés se sont posées dans le cadre de l’examen des dossiers, principalement en raison des incohérences dans les pratiques de collecte de données dans les régions. Plus particulièrement, des différences ont été constatées dans l’utilisation des formulaires désignés liés à la CCDV, dont les suivantes :
- les formulaires ne se trouvaient pas dans iCase;
- les formulaires n’étaient pas remplis;
- les formulaires étaient partiellement remplis, c.-à-d. qu’ils comportaient les notes des CTC, mais les listes de vérification liées à la CCDV n’avaient pas été suivies.
Les résultats de l’examen des dossiers dans les régionsNote de bas de page 20 sont les suivants :
Nunavut | Territoires du Nord-Ouest |
Yukon | Total | |||||
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
n | % | n | % | n | % | n | % | |
Aucun formulaire au dossier | 100 | 52 % | 17 | 14 % | 10 | 16 % | 127 | 34 % |
Formulaire non rempli | 31 | 16 % | 29 | 28 % | 16 | 25 % | 76 | 20 % |
Formulaire rempli partiellement avec les notes d’un CTC | 4 | 2 % | 11 | 9 % | 18 | 28 % | 33 | 9 % |
Formulaire rempli | 58 | 30 % | 63 | 53 % | 20 | 31 % | 141 | 37 % |
Total | 193 | 100 % | 120 | 100 % | 64 | 100 % | 377 | 100 % |
Comme il est indiqué dans ce tableau, 127 dossiers examinés ne comportaient aucun formulaire lié à la CCDV. Toutefois, les données montrent que les CTC avaient consigné des heures dans 38 de ces dossiers :
- 25 dossiers au Bureau régional du Nunavut (BRN), pour une moyenne de 1,8 heure par dossier;
- 11 dossiers au BRTNO, pour une moyenne de 2,5 heures par dossier;
- 2 dossiers au BRY, pour une moyenne de 0,75 heure par dossier.
Les autres difficultés rencontrées lors de la réalisation de l’examen des dossiers se rapportaient à la conception des formulaires liés à la CCDV. Plus particulièrement, que le contenu et le format des formulaires avaient été modifiés un certain nombre de fois depuis l’EF 2015-2016, ce qui a donné lieu à des incohérences dans le type de renseignements recueillis.
Par conséquent, il n’a pas été possible d’évaluer les progrès du programme en matière d’atteinte des résultats liés à la clientèle dans le cadre de l’évaluation.
5.1 Sensibilisation des victimes et des témoins quant à leurs droits et responsabilités
Les principaux moyens employés dans le cadre du Programme pour faire connaître le système judiciaire et les droits des victimes sont axés sur l’utilisation des formulaires liés à la CCDV par les CTC et les interactions avec les victimes une fois que des accusations ont été déposées. Autrement, les efforts déployés dans le cadre du Programme pour accroître la sensibilisation aux questions liées au système de justice pénale et aux victimes ont été limités.
En ce qui concerne le matériel de promotion, les trois régions ont produit des dépliants à l’intention des victimes, mais les renseignements qu’ils comportent diffèrent. Les trois dépliants donnent une brève description du rôle des CTC, y compris des services de soutien que ces derniers peuvent offrir. Les différences constatées sont les suivantes :
- les dépliants produits par les Territoires du Nord-Ouest et le Nunavut résument les droits des victimes en vertu de la CCDV et sont offerts dans diverses langues autochtones.
- le dépliant produit par le Yukon porte principalement sur le processus judiciaire et fournit des renseignements sur la déclaration de la victime, le témoignage, le comportement devant le tribunal et le rôle de la GRC, de l’avocat et des CTC. Le dépliant est offert en français et en anglais.
Les entrevues réalisées ont montré que les dépliants n’avaient pas été largement diffusés et qu’ils étaient remis occasionnellement aux victimes et aux témoins par les CTC.
Dans les T.N.-O., des responsables du Programme ont participé à l’élaboration de brochures et d’un manuel de suivi judiciaire publiés par le Comité de justice d’InuvikNote de bas de page 21. Le manuel de suivi judiciaire vise à fournir des ressources aux travailleurs des services aux victimes pour aider ces dernières une fois que les procédures judiciaires sont terminées. Les brochures de suivi judiciaire, quant à elles, sont destinées au grand public et donnent de l’information sur le processus judiciaire et sur ce à quoi il faut s’attendre une fois que celui-ci a pris fin, ainsi que des renseignements sur les services disponibles.
Dans l’ensemble, les efforts de sensibilisation déployés dans le cadre du Programme ont principalement été axés sur la communication avec les victimes et les témoins après le dépôt d’accusations. Il pourrait être possible d’explorer d’autres façons d’accroître la sensibilisation, non seulement aux questions liées à la justice pénale et aux victimes, mais également au Programme des CTC. Des affiches pourraient être apposées et des dépliants pourraient être disponibles dans les endroits visités par les victimes et les témoins, comme les tribunaux, les organismes de services aux victimes et les bureaux de la GRC. De plus, un certain nombre de CTC ont suggérés qu’on leur fournisse des cartes professionnelles qu’ils pourraient remettre aux victimes, aux témoins et aux fournisseurs de services aux victimes durant leurs déplacements pour les audiences du tribunal itinérant.
En outre, d’autres entités fédéralesNote de bas de page 22 publient de l’information sur les droits des victimes et mettent des ressources en ligne pour aider les victimes à s’y retrouver dans le système de justice pénale. À l’heure actuelle, aucune page du site Web du SPPC n’est consacrée spécifiquement à de l’information sur les droits des victimes et le processus judiciaire, non plus une description du Programme des CTC Note de bas de page 23.
5.2 Participation des victimes et des témoins au processus judiciaire
Les formulaires liés à la CCDV dans chacune des régions comportent des renseignements permettant de savoir si :
- une déclaration de la victime a été remplie et présentée;
- la victime souhaite présenter sa déclaration devant le tribunal ou si elle préfère qu’un tiers le fasse en son nom;
- la victime a demandé d’avoir accès à des dispositifs d’aide au témoignage;
- la victime demande un dédommagement.
Le formulaire lié à la CCDV utilisé au Yukon indique également si les victimes ont reçu de l’aide en vue du procès, notamment une préparation à l’audience et au témoignage. Par conséquent, les outils du Programme sont conçus de façon à recueillir les renseignements pertinents sur la préparation d’une victime au processus judiciaire. Cependant, aucune donnée n’était disponible pour évaluer les résultats à cet égard.
Incidemment, le sondage mené auprès des informateurs clés permet de constater que ces derniers reconnaissent généralement l’importance des CTC en matière de soutien aux victimes et aux témoins. En outre, presque tous les répondants au sondage mené auprès des avocats (85 %) estimentNote de bas de page 24 que les CTC jouent un rôle important lorsqu’il s’agit d’aider les victimes et les témoins tout au long du processus judiciaire. Toutefois, les avis étaient partagés au sein des avocats du BRN, la moitié ayant indiqué que l’aide fournie par les CTC était suffisante « dans une certaine mesure », alors que l’autre moitié estimait que l’aide apportée était suffisante « dans une faible mesure ».
5.3 Accès à des services qui répondent aux besoins des victimes et des témoins
Les données n’étaient pas facilement disponibles quant au nombre et aux types de services fournis par les CTC aux victimes et aux témoins. De plus, dans le cadre de l’évaluation, aucun sondage ni consultation n’a été mené auprès des victimes et des témoins pour recueillir leurs points de vue sur leur expérience des services fournis par les CTC. Incidemment, les représentants des fournisseurs de services aux victimes dans les territoires ont tous souligné le rôle important que jouent les CTC dans l’aide qui est apportée aux victimes durant le processus judiciaire. En outre, les résultats du sondage auprès des avocats montrent que presque tous les répondants estiment que les CTC fournissent un niveau de soutien suffisantNote de bas de page 25 aux victimes et aux témoins dans leur région.
Le rôle des CTC consiste en partie à aiguiller les victimes et les témoins vers d’autres services communautaires en fonction des besoins. Toutefois, les données sur le nombre de victimes ou de témoins aiguillés par les CTC n’étaient pas facilement disponibles, pas plus que les données sur la nature des renvois effectués. Tous les CTC interrogés ont toutefois fait remarquer qu’ils orientaient régulièrement les victimes et les témoins vers les services aux victimes de leur région ou vers d’autres services communautaires pertinents. Ce point a été confirmé par des représentants d’organismes fournisseurs de services aux victimes, qui ont dit recevoir régulièrement des renvois de la part des CTC.
Services culturellement adaptés
Le Programme des CTC a été créé pour [traduction] « combler l’écart culturel entre les procureurs et les victimes et témoins auprès de qui ils travaillent et entre les traditions profondément ancrées dans la Common Law et les cultures autochtones et inuites »Note de bas de page 26. Les statistiques montrent que les Autochtones représentent la plus grande part de la population du Nunavut (86 %), suivi par les Territoires du Nord-Ouest (51 %) et le Yukon (23 %)Note de bas de page 27. En date du 31 mars 2023, les renseignements déclarés volontairement montraient que les ressources du Programme étaient conformes à cette réalité (Figure 2).
En outre, la plupart des CTC du BRN sont en mesure de communiquer avec les clients en inuktut.
5.4 Sensibilisation des droits et des besoins des victimes et des témoins chez les intervenants du système de justice pénale
Les CTC assurent la liaison entre les avocats et les victimes et témoins, et sont chargés de recueillir les renseignements qui sont pertinents par rapport à la poursuite. Ils recueillent notamment des renseignements sur la disponibilité des victimes et des témoins pour les audiences, les préoccupations en matière de sécurité, les besoins en matière d’outils d’aide au témoignage et la disposition à préparer une déclaration de la victime. On s’attend à ce que les CTC communiquent ces renseignements aux avocats.
Du point de vue des procureurs, les résultats du sondage auprès des avocats révèlent que ces derniers ont généralement une opinion positive en ce qui concerne les renseignements qui leur sont communiqués par les CTC sur les besoins des victimes et des témoins. Plus particulièrement, les résultats du sondage montrent que presque tous les répondants (85 %) estiment :
- qu’en travaillant avec les CTC, ils ont un niveau adéquat de connaissanceNote de bas de page 29 en ce qui concerne les besoins des victimes et des témoins dans les dossiers qu’ils traitent;
- que les CTC leur ont fourni suffisamment d’informationNote de bas de page 30 sur les besoins des victimes et des témoins.
De plus, dans le rôle qu’ils sont appelés à jouer, les CTC communiquent souvent avec la GRC pour obtenir les coordonnées des victimes et des témoins. Au BRY, quelques CTC ont souligné que, dans certains cas, ils présentent des exposés pour informer les nouveaux membres de la GRC dans la communauté sur le rôle des CTC. Toutefois, aucune présentation n’a été donnée depuis le début de la pandémie de la COVID-19. Les résultats du sondage effectué auprès des membres de la GRC portent à croire que les efforts d’information et de sensibilisation visant les membres de la GRC pourraient avoir été utiles, car :
- les membres de la GRC n’étaient pas au courant du rôle et des responsabilités des CTC;
- les membres de la GRC confondaient parfois les CTC et les travailleurs des services aux victimes.
5.5 Soutien au déroulement des poursuites
Le soutien fourni par les CTC aux avocats et au déroulement général des poursuites a été considéré comme étant important par les personnes interrogées et les répondants du sondage auprès des avocats. En l’absence du Programme des CTC, il incomberait aux avocats, qui sont déjà responsables de gérer une lourde charge de travail, de communiquer avec les victimes et témoins et de maintenir un contact régulier avec eux, d’organiser des rencontres et de recueillir des renseignements pertinents pour la poursuite.
En outre, 80 % des répondants au sondage auprès des avocats ont déclaré que les CTC répondaient à leurs besoins en tant que procureursNote de bas de page 31. [CAVIARDÉ] Les avocats ont fait état des lacunes et des difficultés suivantes :
- il y a des incohérences dans le rendement des CTC;
- les CTC ne reçoivent pas de formation suffisante, plus particulièrement à l’occasion du processus d’intégration;
- il n’y a pas suffisamment de CTC pour répondre aux exigences liées à la charge de travail.
6.0 Gestion du Programme des CTC
Divers aspects de l’administration du Programme des CTC ont été examinés dans le cadre de l’évaluation, notamment :
- les ressources humaines, y compris les congés utilisés par le personnel du Programme;
- les charges de travail et la comptabilisation du temps des CTC;
- les outils et pratiques de collecte de données;
- la formation.
6.1 Collecte de données et production de rapports
Constatation nº 5 : Des incohérences dans la conception des outils de collecte de données font en sorte qu’il est difficile d’évaluer les résultats du Programme des CTC et de produire des rapports à cet égard.
Dans le cadre de l’évaluation précédente du Programme des CTC, menée en 2020, il s’est avéré difficile d’évaluer l’efficacité du Programme compte tenu d’importantes limites quant au nombre de données disponibles. Par conséquent, on recommandait, dans le rapport d’évaluation, que le SPPC élabore des indicateurs pour suivre et mesurer le rendement du Programme des CTC. Des indicateurs de rendement ont donc été créés pour le Programme, et on a entrepris de déployer des efforts pour recueillir activement et systématiquement des données à des fins de mesure du rendement et de production de rapports. Toutefois, des consultations ont permis de constater que la collecte de donnée et la production de rapports sur le Programme avaient récemment pris fin pour les raisons suivantes :
- la collecte de données était de nature complexe et devait être faite manuellement;
- les données n’avaient pas été utilisées pour la prise de décisions relatives au Programme.
Dans le cadre de la présente évaluation, les pratiques et les outils en matière de collecte de données ont été examinés pour mettre en évidence les pratiques exemplaires et les points à améliorer.
Formulaires liés à la CCDV
Chacune des trois régions a élaboré ses propres formulaires uniques qui servent de principal outil de collecte de renseignements utilisés par les CTC dans leurs interactions avec les victimes. Bien qu’ils comportent des différences dans leur structure et leur format, ces formulaires permettent de recueillir des renseignements similaires, dont la plupart se rapportent aux droits prévus dans la CCDV, ainsi que d’autres renseignements qu’il convient de recueillir auprès des victimes aux fins de la poursuite.
L’utilisation des formulaires liés à la CCDV sert à deux fins :
- reddition de comptes : les formulaires peuvent servir à démontrer que le SPPC s’est acquitté de ses obligations en vertu de la CCDV;
- continuité : lorsqu’ils sont dûment remplis, les formulaires fournissent des renseignements sur les questions qui ont été abordées ou non avec une victime ou un témoin, ce qui permet ainsi de maintenir un certain niveau de continuité en cas de transfert de dossier d’un CTC à un autre.
Toutefois, un manque d’uniformité dans les formulaires utilisés dans les régions a été constaté dans le cadre de l’évaluation. Par exemple, les formulaires liés à la CCDV ne traitent pas de tous les droits qui doivent être portés à la connaissance des victimes. Les formulaires utilisés par le BRN et le BRY ne comportent pas de case à cocher par les CTC pour indiquer si une victime a été informée de son droit de porter plainte, une lacune qui a également été observée dans le cadre de l’audit précédent du Programme, en 2020. D’autres différences ont également été constatées :
- les formulaires utilisés par le BRN et le BRTNO comportent une case à cocher par les CTC pour indiquer si une victime a été aiguillée vers les services aux victimes;
- le formulaire utilisé par le BRY comporte des cases à cocher quant à la préparation au procès, y compris une case qui permet de savoir si la victime a reçu une copie de sa déclaration et une orientation sur le processus judiciaire et le témoignage;
- le formulaire utilisé par le BRN comporte une section visant à rappeler aux CTC d’informer les victimes du résultat de l’affaire et de leur demander si elles ont reçu de l’information sur la Commission des libérations conditionnelles;
- le formulaire utilisé par le BRTNO comprend les dates auxquelles des renseignements ont été communiqués à une victime;
- le formulaire utilisé par le BRTNO comporte une section qui permet à une victime de s’identifier comme étant une personne vulnérableNote de bas de page 32.
Comme indiqué à la section 5, des difficultés se sont posées dans le cadre de l’évaluation en ce qui a trait à la collecte et à l’analyse de données sur les clients desservis et les services fournis par le Programme, en partie en raison des différences susmentionnées. De plus, les formulaires ont été utilisés de manière incohérente. Par exemple, un des cinq formulaires examinés dans le cadre de l’examen des dossiers d’iCase n’avait pas été rempli. Les formulaires ne sont pas toujours remplis par les CTC pour plusieurs raisons. Par exemple, les CTC font régulièrement face à des obstacles lorsqu’ils cherchent à contacter les victimes et témoins, et il arrive souvent qu’ils ne réussissent pas à les joindre. De plus, il est possible que des victimes n’acceptent pas de coopérer en ce qui concerne la poursuite et qu’elles refusent de communiquer avec les CTC ou demandent que les accusations soient retirées.
Dédoublement dans la collecte de données
Un examen des outils de collecte des données du Programme et des entrevues menées auprès des CTC ont révélé qu’il y a un dédoublement des renseignements consignés dans les formulaires liés à la CCDV et les fiches en préparation aux audiences du tribunal itinérant utilisées par les CTC du BRN et du BRTNO. En outre, la question du dédoublement a également été signalée lors de l’audit précédent du Programme des CTC, effectué en 2020, à l’occasion duquel on a recommandé que les formulaires liés à la CCDV utilisés dans chaque région soient examinés pour déterminer si les renseignements recueillis faisaient double emploi avec des renseignements recueillis dans d’autres formulaires ou dans le cadre d’autres processus
Recommandation nº 2 : Le SPPC devrait réviser les pratiques et les outils de collecte de données pour :
|
Réponse de la direction :
À ces fins, l’administration centrale, de concert avec les régions et bénéficiant de tout le soutien nécessaire de leur part, fera en sorte, au cours de 2024-2025 : À ces fins, l’administration centrale, de concert avec les régions et bénéficiant de tout le soutien nécessaire de leur part, fera en sorte, au cours de 2024-2025 :
|
Recommandation nº 3 : Compte tenu des limites et des incohérences des outils et processus de collecte de données actuels, le SPPC devrait s’assurer que les besoins en matière de données sur le Programme seront pris en compte par le futur système de gestion des dossiers juridiques (SGDJ) de l’organisme. |
Réponse de la direction : Les groupes suivants, responsables du nouveau projet de SGDJ, recevront le présent rapport d’évaluation :
pour veiller à ce que les besoins en matière de données liées à la CCDV soient pris en considération dans le cadre de la phase de prédéfinition du nouveau projet de SGDJ. Les résultats du travail découlant de la recommandation 2 seront acheminés à l’équipe de projet du SGDJ. |
6.2 Charge de travail
Constatation nº 6 : Des incohérences dans les pratiques de comptabilisation du temps des CTC dans l’ensemble des régions font en sorte qu’il est difficile d’évaluer avec précision les charges de travail des CWC.
Dossiers avec victimes participantes
Dans le cadre de l’évaluation, les données d’iCase ont été analysées dans le but d’obtenir un aperçu de la charge de travail des CTC dans chacune des régions. Pour le Programme dans son ensemble, l’examen des dossiers a montré que le système iCase comportait 23 042 dossiers incluant des victimes participantes. Sur le plan régional, le BRN détient le plus grand nombre de dossiers avec des victimes participantes. Le nombre de dossiers a également augmenté de façon constante dans la région au cours des huit dernières années (Figure 3).
Version textuelle
Région | 2015-16 | 2016-17 | 2017-18 | 2018-19 | 2019-20 | 2020-21 | 2021-22 | 2022-23 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Nunavut | 1153 | 1151 | 1343 | 1361 | 1443 | 1698 | 1855 | 1776 |
Territoires du Nord‑Ouest | 856 | 767 | 972 | 1047 | 1121 | 959 | 863 | 761 |
Yukon | 464 | 417 | 401 | 446 | 620 | 480 | 592 | 498 |
Comptabilisation du temps dans les dossiers avec victimes participantes
Dans le cadre de l’évaluation, les données d’iCase ont été analysées pour examiner les tendances concernant la comptabilisation du temps chez les CTC. Dans l’ensemble les CTC ont consigné des heures dans près de 54 % des dossiers avec victimes participantes. L’analyse a révélé des écarts notables à la suite d’une comparaison des pratiques de comptabilisation du temps dans les régions. Les CTC du BRTNO ont consigné des heures dans 90 % des dossiers avec victimes participantes. La comptabilisation du temps dans les dossiers avec victimes n’était pas uniforme dans les deux autres régions, en particulier au BRN, qui a connu une baisse constante au niveau de la comptabilisation du temps chez les CTC au cours des huit dernières années (Figure 4).
Version textuelle
Région | 2015-16 | 2016-17 | 2017-18 | 2018-19 | 2019-20 | 2020-21 | 2021-22 | 2022-23 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Territoires du Nord‑Ouest | 89 % | 91 % | 93 % | 87 % | 83 % | 94 % | 97 % | 89 % |
Yukon | 54 % | 56 % | 49 % | 66 % | 55 % | 58 % | 44 % | 56 % |
Nunavut | 41 % | 44 % | 69 % | 42 % | 34 % | 21 % | 27 % | 13 % |
L’analyse a également porté sur le nombre d’heures que les CTC avaient consigné aux dossiers incluant des victimes participantes. Dans l’ensemble, les CTC ont consigné une moyenne de 4,6 heures par dossier. Le nombre d’heures moyennes consigné par dossier était réparti comme suit dans les régions :
- 5,6 heures au BRY;
- 5,5 heures au BRTNO;
- 2,4 heures au BRN.
Toutefois, les données montrent que la tendance est à la baisse en ce qui concerne le nombre moyen d’heures consignées par dossier depuis l’EF 2015-2016. Pour le Programme dans son ensemble, le nombre moyen d’heures consignées par les CTC par dossier était de 5,6 heures en 2015-2016, lequel a baissé graduellement pour s’établir à 2,8 heures pour l’EF 2022-2023. Cette tendance a été observée dans les trois régions (Figure 5).
Version textuelle
Région | 2015-16 | 2016-17 | 2017-18 | 2018-19 | 2019-20 | 2020-21 | 2021-22 | 2022-23 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Territoires du Nord‑Ouest | 7,4 | 6,4 | 6,1 | 6,1 | 4,4 | 5,1 | 5,0 | 2,9 |
Yukon | 5,2 | 5,8 | 8,7 | 5,1 | 6,4 | 5,7 | 4,5 | 3,9 |
Nunavut | 2,8 | 3,2 | 3,8 | 2,7 | 1,9 | 1,3 | 1,3 | 1,1 |
L’examen des données d’iCase a également porté sur le nombre de CTC qui comptabilisent du temps par dossier, c.-à-d. le nombre de CTC consignant des heures dans chaque dossier. L’analyse a montré qu’une moyenne de trois CTC ont consigné des heures dans des dossiers au BRTNO, comparativement à un CTC en moyenne par dossier au BRN et au BRY. En outre, des heures ont été consignées par quatre CTC ou plus dans près d’un tiers des dossiers au BRTNO. Cette différence pourrait découler :
- du transfert d’un dossier d’un CTC à un autre en raison d’un roulement de personnel;
- d’un manque d’uniformité dans les pratiques de comptabilisation du temps dans les régions, les CTC consignant leurs heures dans iCase pour différentes raisons.
D’autres renseignements sur la comptabilisation du temps se trouvent à l’Annexe D.
Autres dossiers
L’examen des données d’iCase a révélé que les CTC ont consigné des heures dans un grand nombre de dossiers ne comportant aucune victime participante. Dans l’ensemble, 22 % des heures à ces dossiers ont été consignées par des CTC. Sur le plan régional, 24 % des heures ont été consignées par des CTC dans ce type de dossiers au BRTNO, comparativement à 20 % au BRN et au BRY (Figure 6).
Version textuelle
Région | Avec victimes participantes | Sans victimes participantes |
---|---|---|
Territoires du Nord‑Ouest | 76 % | 24 % |
Nunavut | 80 % | 20 % |
Yukon | 80 % | 20 % |
Ces résultats portent à croire qu’il pourrait y avoir des incohérences dans les pratiques de saisie des données dans iCase dans les régions, puisqu’un bon nombre de dossiers portaient sur des infractions qui auraient pu avoir été perpétrées contre une victime. Cependant, il est également possible que les CTC aient consigné leurs heures dans des dossiers qui ne comportaient pas de victimes ou de témoins et, ainsi, que leur participation dans ces dossiers n’aurait pas été nécessaire ou indiquée.
Gestion des dossiers
Les renseignements recueillis dans le cadre des entrevues laissent croire qu’il manque de processus et d’outils pour appuyer les CTC dans la gestion de leurs dossiers et pour exercer une surveillance adéquate du travail effectué par ceux-ci. Par exemple :
- quelques CTC ont souligné que les membres de leur équipe ont adopté différentes façons de gérer leurs dossiers et d’effectuer leur travail;
- au BRN et au BRTNO, les CTC remplissent un document en prévision de leurs déplacements avec le tribunal itinérant, ce qui leur permet d’organiser les dossiers, de s’assurer que la documentation est complète et de noter la disponibilité des victimes et l’état des communications avec elles. Quelques CTC au BRN ont expliqué que les fiches de préparation en vue d’un déplacement avec le tribunal itinérant sont remplies une ou deux semaines avant le déplacement prévu. Deux répondants au sondage mené auprès de membres de la GRC, un du BRN et l’autre du BRTNO, ont estimé que les demandes des CTC pour obtenir les coordonnées des victimes n’avaient pas été présentées en temps opportun et, par conséquent, que le contact avec les victimes avait été retardé et n’avait été effectué que quelques semaines avant la date prévue de l’audience.
Pour ce qui est du point de vue des procureurs, quelques répondants au sondage menés auprès des avocats ont souligné qu’il n’existait actuellement aucun processus ou outil normalisé pour faire un suivi de la charge de travail des CTC, des demandes qui leur sont adressées ou des tâches qui leur sont assignées. Des préoccupations ont été soulevées au sujet d’un manque de gestion systématique par rapport aux charges de travail des CTC et de l’absence de mécanismes ou d’outils pour s’assurer que les suivis auprès des victimes sont effectués de façon régulière et en temps opportun.
Communications avec les victimes et témoins
Tous les CTC ont souligné que la communication avec les victimes et les témoins se fait principalement par téléphone et, dans certains cas, par courriel. Cependant, les CTC ont également noté qu’il peut être assez difficile d’entrer en contact avec les clients. Par exemple, il est possible que les clients n’aient pas de téléphone cellulaire ou, souvent, qu’ils n’aient plus de minutes sur leur forfait de téléphone cellulaire. De plus les CTC ont mentionné qu’il arrivait fréquemment que des victimes aient un téléphone cellulaire, mais uniquement avec un accès Internet. Par conséquent, les réseaux sociaux, particulièrement Facebook, ont été cités comme étant une des façons les plus efficaces de communiquer avec les victimes et témoins.
En 2020, le SPPC a lancé un projet pilote en créant un compte Facebook ministériel que les CTC pouvaient utiliser pour entrer en contact avec les victimes. Cependant, le projet pilote s’est soldé par un échec, car le compte ne permettait pas d’accéder aux fonctionnalités requises pour répondre aux besoins du ProgrammeNote de bas de page 33.
[CAVIARDÉ] La région a également ajouté une section au formulaire lié à la CCDV pour noter les coordonnées Facebook.
Le SPPC a également publié une directive interdisant d’utiliser des comptes Facebook personnels pour communiquer avec les clients.
6.3 Ressources humaines
Constatation nº 7 : Le Programme des CTC a fait face à des défis en matière de ressources humaines au cours des huit dernières années, notamment à un taux élevé de roulement au sein du personnel, ce qui a posé des risques opérationnels en termes d’uniformité dans la prestation des services et de la capacité à cet égard.
Roulement
Les points de vue recueillis durant les entrevues montrent généralement que le Programme a eu dans le passé des difficultés à recruter des CTC et à les maintenir en poste. Les données administratives révèlent que le taux de roulement parmi les employés du Programme est en général demeuré constant dans les trois régions depuis l’EF 2015-2016. En moyenne, le Programme a embauché environ six CTC et a enregistré cinq départs par année (Figure 7).
Version textuelle
2015-16 | 2016-17 | 2017-18 | 2018-19 | 2019-20 | 2020-21 | 2021-22 | 2022-23 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Embauches | 12 | 2 | 5 | 5 | 8 | 5 | 4 | 8 |
Départs | 6 | 3 | 5 | 7 | 6 | 4 | 1 | 11 |
Sur le plan régional, la tendance montre que le ratio embauches-départs était d’environ 1:1, bien que le taux de roulement ait été plus prononcé au BRTNO (Figure 8).
Version textuelle
Région | Moyenne annuelle des embauches | Moyenne annuelle des départs |
---|---|---|
Territoires du Nord‑Ouest | 3,0 | 2,8 |
Yukon | 1,8 | 1,4 |
Nunavut | 1,4 | 1,3 |
Non seulement le roulement a-t-il été récurrent dans les régions depuis 2015-2016, mais les données montrent également que les CTC restent en poste pour une durée relativement courte. En général, les personnes travaillant comme CTC sont restées en poste pendant près de trois ans. Dans les régions, les anciens CTC sont restés moins longtemps en poste en moyenne au BRY, soit un peu moins de deux ans, alors que la moyenne était de trois ans au BRTNO et de près de quatre ans au BRN. D’autres données sur le roulement dans chaque région se trouvent à l’Annexe A (Figure 14).
On peut voir l’impact du roulement dans le nombre de CTC débutants dans l’ensemble des régions. Pour les personnes embauchées comme CTC en date du 31 mars 2023, les données administratives montrent que près d’un tiers (6 sur 19) d’entre elles avait moins d’un an d’expérience dans ce rôle. Sur le plan régional, 2 CTC sur 5 au BRN et 3 CTC sur 8 au BRTNO occupaient ce poste depuis moins de 12 mois.
D’autres données sur les années d’expérience moyennes et médianes chez les personnes ayant été embauchées à titre de CTC en date du 31 mars 2023 se trouvent à l’Annexe B (Figure 15).
Congés
Les données de PeopleSoft sur les congés utilisés par les CTC depuis l’EF 2015-2016 ont également été analysées dans le cadre de l’évaluation. En ce qui concerne l’analyse, l’évaluation a permis d’estimer que 1 950 heures de travail étaient disponibles par année pour un employé à temps plein, ce qui correspond à 260 jours ouvrables par année.
Version textuelle
Période | Total des congés utilisés par le personnel du Programme des CTC, exprimé en ETP |
---|---|
2015-16 | 4,4 |
2016-17 | 3,6 |
2017-18 | 3,2 |
2018-19 | 3,4 |
2019-20 | 2,4 |
2020-21 | 2,8 |
2021-22 | 2,8 |
2022-23 | 3,0 |
Moyenne | 3,2 |
D’autres données sur les congés utilisés par le personnel du Programme des CTC pour chaque région se trouvent à l’Annexe C.
Défis
Quelques informateurs clés se sont dit préoccupés en ce qui concerne le roulement et le nombre de congés utilisés par les CTC, précisant que cette situation représentait un risque quant à la capacité de prestation des services du Programme. Toutefois, selon eux, la nature du travail et la charge de travail exigeante des CTC sont les principaux facteurs ayant contribué à une augmentation des absences, de l’épuisement et du roulement de personnel.
Le taux élevé de roulement, combiné à la perte de ressources en raison de congés, risque d’avoir des répercussions opérationnelles en raison :
- du nombre insuffisant d’employés pour répondre aux exigences liées à la charge de travail;
- de la perte de productivité liée à la formation et au recrutement continus des nouveaux CTC;
- d’un manque de cohérence auprès des clients.
Le nombre de CTC consignant des heures par dossiers peut être un indicateur des impacts que pourraient avoir les défis en matière de ressources humaines sur la charge de travail des CTC et la prestation des services, particulièrement au BRTNO, qui a fait face à un niveau plus élevé de roulement que dans les autres régions. Comme il est indiqué à la sous-section 6.2, le nombre moyen de CTC consignant des heures par dossier au BRTNO était trois fois plus élevé que celui du BRN et du BRY (3 pour 1). Les entrevues menées ont révélé que les dossiers du BRTNO qui portent sur des infractions graves, comme des agressions sexuelles et d’autres infractions avec violence, sont généralement attribués. Cependant, les données d’iCase montrent que deux CTC ou plus avaient consigné des heures dans 89 % des dossiers d’agressions sexuelles incluant des victimes participantes, alors qu’ils étaient quatre ou plus à l’avoir fait dans 52 % des dossiers.
6.4 Formation
Constatation nº 8: Les occasions limitées de formation et l’absence d’un processus normalisé d’intégration pour les CTC pourraient contribuer aux incohérences dans la prestation des services et les pratiques administratives dans les régions.
À l’heure actuelle, il n’existe aucun processus normalisé d’intégration ou de formation pour les nouveaux CTC qui se joignent au SPPC. Les CTC interrogés dans le cadre des entrevues ont souligné que leur formation initiale avait principalement été axée sur :
- la lecture d’un manuel à l’intention des CTC, notamment d’une série de modules traitant de divers sujets en lien avec le rôle des CTC;
- une formation en jumelage, dirigée par un autre CTC.
Compte tenu du taux élevé de roulement au sein du personnel du Programme, il est possible que certains CTC soient formés par des collègues ayant une expérience limitée en tant que CTC. En outre, le fait de s’être appuyé principalement sur le jumelage comme méthode pour offrir l’essentiel de la formation aux CTC pourrait avoir entraîné un manque d’uniformité dans les pratiques de gestion de dossiers et autres pratiques administratives, comme la comptabilisation du temps et la saisie de données dans iCase. En effet, comme il est indiqué à la sous-section 6.2, les renseignements recueillis lors des entrevues portent à croire que les CTC pourraient avoir adopté différentes approches en ce qui a trait à la gestion et à l’exécution de leurs tâches.
Les CTC ont également fait remarquer que les occasions de formation avaient été peu nombreuses au cours des dernières années. La formation a également été signalée comme un volet à améliorer dans le sondage mené auprès des avocats, à l’occasion duquel le quart des répondants a souligné qu’il était nécessaire d’offrir plus d’occasions à cet égard aux CTC. Les CTC et les avocats ont présenté des suggestions de formations qui pourraient être utiles aux CTC :
- prise de notes;
- entrevues et communications avec des victimes et des témoins vulnérables;
- gestion liée aux traumatismes vicariants;
- approches tenant compte des traumatismes dans les interactions avec les clients.
Les CTC nouvellement embauchés pourraient manquer d’expérience pour ce qui est de travailler directement avec les populations vulnérables, ou pourraient ne pas connaître, ou sinon très peu, le droit et le système de justice pénale. Ainsi, le fait d’officialiser le processus d’intégration et de formation au Programme pour les nouveaux CTC est essentiel pour assurer un certain degré d’uniformité dans la prestation des services dans l’ensemble des régions.
Recommandation nº 4 : Le SPPC devrait élaborer un plan d’intégration et de formation à l’intention des CTC afin de :
|
Réponse de la direction :
|
7.0 Conclusion
Dans l’ensemble, le Programme des CTC répond à un besoin clair et vérifiable. Historiquement, les victimes et les témoins ont fait face à un certain nombre d’obstacles importants à leur participation au système de justice pénale, dont celui d’avoir à composer avec de l’incertitude et de la confusion lorsqu’ils s’engagent dans un processus intimidant, complexe et inconnu. Le Programme des CTC vise à éliminer ces obstacles en :
- tenant les victimes et témoins informés de l’évolution de leur dossier;
- communiquant les besoins des victimes et des témoins aux avocats ou aux autres organismes fournisseurs de services dans la communauté;
- apportant des précisions sur le processus de justice pénale.
De plus, les CTC, jouent un rôle important dans le soutien qu’ils apportent aux avocats et au déroulement des poursuites. En l’absence des CTC, une grande partie du travail qui leur incombe actuellement devrait autrement être effectuée par les avocats. Par exemple, en ce qui a trait à l’établissement d’un premier contact et au maintien de la communication avec les victimes et les témoins, ainsi qu’à la collecte de renseignements pertinents aux poursuites, de même qu’à la communication de renseignements aux victimes et aux témoins concernant leurs droits et responsabilités dans le cadre du processus judiciaire.
Toutefois, selon la présente évaluation, le Programme a fait face à d’importantes difficultés qui persistent depuis plusieurs années qu’il conviendrait de régler. L’une des plus grandes difficultés auxquelles le Programme est confronté est sa capacité de présenter des résultats quantifiables. La collecte de données pour le Programme, en particulier au moyen des formulaires liés à la CCDV, a été inégale dans l’ensemble des régions. Les formulaires utilisés ne recueillent pas tous les mêmes renseignements et ne sont pas utilisés de façon uniforme dans les régions. De plus, on a constaté que les pratiques de comptabilisation du temps manquaient également d’uniformité dans les trois bureaux, de sorte qu’il est difficile de mesurer avec exactitude les charges de travail des CTC. L’établissement d’attentes claires et des pratiques uniformes de collecte de données permettront au SPPC de mieux suivre les services qu’il offre aux victimes et aux témoins, de cerner les points à améliorer et de mesurer les répercussions du Programme. De plus, l’intégration des exigences du Programme en matière de données dans le futur SGDJ du SPPC aidera à combler les lacunes et les inefficacités des outils de collecte de données existants du Programme. Cela permettra également à l’organisme de démontrer qu’il se conforme aux obligations qui lui incombent en vertu de la CCDV.
Un autre défi à relever a trait au maintien et à l’uniformité de niveaux de ressources suffisants pour mener à bien les opérations du Programme. Un roulement constant et l’absence d’un processus normalisé d’intégration et de formation pour les nouveaux CTC risquent d’entraîner des incidences opérationnelles telles que la perte de productivité, le manque de ressources suffisantes pour gérer les charges de travail et une absence d’uniformité dans les services offerts aux victimes et aux témoins. De plus, l’effectif actuel du Programme est composé d’un nombre assez important de travailleurs relativement débutants, dont certains ont peu ou pas d’expérience dans le milieu juridique ou dans le travail auprès de populations vulnérables. Une expérience d’apprentissage et une formation similaire soient offertes aux CTC afin qu’ils aient une compréhension claire et commune de leur rôle et des attentes à cet égard.
Les recommandations formulées dans le présent rapport visent à guider les actions du SPPC dans une voie à suivre pour régler ces difficultés.
Annexe A – Roulement du personnel au sein du Programme des CTC
Version textuelle
2015-16 | 2016-17 | 2017-18 | 2018-19 | 2019-20 | 2020-21 | 2021-22 | 2022-23 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Embauches | 1 | 2 | 1 | 1 | 2 | 0 | 2 | 2 |
Départs | 0 | 0 | 1 | 3 | 2 | 0 | 0 | 4 |
Version textuelle
2015-16 | 2016-17 | 2017-18 | 2018-19 | 2019-20 | 2020-21 | 2021-22 | 2022-23 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Embauches | 6 | 0 | 1 | 4 | 4 | 3 | 1 | 5 |
Départs | 4 | 1 | 2 | 3 | 4 | 2 | 0 | 6 |
Version textuelle
2015-16 | 2016-17 | 2017-18 | 2018-19 | 2019-20 | 2020-21 | 2021-22 | 2022-23 | |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Embauches | 5 | 0 | 3 | 0 | 2 | 2 | 1 | 1 |
Départs | 2 | 2 | 2 | 1 | 0 | 2 | 1 | 1 |
Version textuelle
Région | Minimale | Médiane | Moyenne | Maximale |
---|---|---|---|---|
Territoires du Nord‑Ouest | 0,1 | 1,9 | 3,0 | 9,8 |
Nunavut | 0,1 | 3,5 | 3,8 | 12,0 |
Yukon | 0,1 | 0,9 | 1,7 | 7,5 |
Annexe B – Nombre d’années d’expérience du personnel du Programme des CTC
Version textuelle
Région | Minimale | Médiane | Moyenne | Maximale |
---|---|---|---|---|
Territoires du Nord‑Ouest | 0,1 | 2,4 | 3,0 | 10,6 |
Nunavut | 0,2 | 4,9 | 5,6 | 14,1 |
Yukon | 0,4 | 3,6 | 5,7 | 13,5 |
Annexe C – Congés utilisés par le personnel du Programme des CTC
Annexe D – Comptabilisation du temps chez les CTC
Version textuelle
Région | 2015-16 | 2016-17 | 2017-18 | 2018-19 | 2019-20 | 2020-21 | 2021-22 | 2022-23 |
---|---|---|---|---|---|---|---|---|
Territoires du Nord‑Ouest | 17.3 | 17,3 | 15,2 | 14,1 | 9,3 | 14,1 | 12,8 | 5,4 |
Yukon | 8,6 | 13,5 | 7,9 | 10,0 | 17,9 | 24,5 | 4,6 | 4,6 |
Nunavut | 6,9 | 5,9 | 4,1 | 4,9 | 2,0 | 1,7 | 1,4 | 1,9 |
Version textuelle
Territoires du Nord‑Ouest | |
---|---|
Nombre de CTC comptabilisant leur temps | Proportion de dossiers |
1 | 25 % |
2 | 25 % |
3 | 21 % |
4+ | 29 % |
Nunavut | |
Nombre de CTC comptabilisant leur temps | Proportion de dossiers |
1 | 91 % |
2 | 9 % |
3 | 1 % |
4+ | 0 % |
Yukon | |
Nombre de CTC comptabilisant leur temps | Proportion de dossiers |
1 | 73 % |
2 | 25 % |
3 | 5 % |
4+ | 1 % |
Version textuelle
Territoires du Nord‑Ouest | |
---|---|
Nombre de CTC comptabilisant leur temps | Proportion de dossiers |
1 | 12 % |
2 | 19 % |
3 | 18 % |
4+ | 52 % |
Nunavut | |
Nombre de CTC comptabilisant leur temps | Proportion de dossiers |
1 | 82 % |
2 | 16 % |
3 | 2 % |
4+ | 0 % |
Yukon | |
Nombre de CTC comptabilisant leur temps | Proportion de dossiers |
1 | 61 % |
2 | 26 % |
3 | 9 % |
4+ | 4 % |
Annexe E – Méthodologie
L’évaluation a été menée selon une approche par méthodes diverses en tenant compte des sources de données suivantes :
- Analyse documentaire : des documents pertinents ont été examinés pour recueillir des renseignements généraux et contextuels sur le Programme des CTC, notamment des documents de base, des manuels et des évaluations antérieures. L’examen a également porté sur des études et des statistiques en matière de criminalité et de victimisation.
- Entrevues avec des informateurs clés : un total de 24 entrevues ont été menées auprès des groupes d’intervenants suivant :
- PFC (n = 3)
- CTC (n = 11)
- Superviseurs des CTC (n = 2)
- Coordonnateurs du Programme des CTC (n = 1)
- Fournisseurs de services aux victimes dans les territoires (n = 7)
- Analyses sectorielles : les programmes de services aux victimes administrés par les gouvernements territoriaux ont été examinés afin d’établir un profil complet des services et des mesures de soutien offerts, de comparer leur conception et leur mise en œuvre, de cerner les pratiques exemplaires et les leçons apprises et de déterminer toute complémentarité ou tout chevauchement avec les services offerts par le Programme des CTC.
- Sondage auprès des avocats du SPPC : un sondage en ligne à l’intention des avocats du SPPC au sein des bureaux régionaux a été mené afin d’obtenir leurs points de vue sur leur expérience de travail auprès des CTC et sur les incidences du Programme des CTC. Le sondage a été envoyé à 56 avocats. Au total, 20 personnes ont répondu au sondage, pour un taux de réponse de 36 %. Dans les régions, 11 personnes du BRTNO ont répondu au sondage, comparativement à 6 personnes au BRN et à 3 personnes au BRY.
- Sondage auprès de membres de la GRC : un sondage en ligne ciblant les membres de la GRC dans les territoires a été mené afin d’évaluer leur niveau de connaissance du Programme des CTC et de recueillir leurs points de vue sur leur expérience de travail avec les CTC. Des représentants de la GRC dans chacune des régions ont diffusé le sondage aux membres de la GRC au nom de l’équipe d’évaluation. Par conséquent, le nombre de membres qui pourraient avoir reçu le sondage n’est pas connu. Au total, 40 personnes ont répondu au sondage, dont 17 au Yukon, 12 dans les Territoires du Nord-Ouest et 11 au Nunavut.
- Analyses de données administratives : les données examinées ont été recueillies à partir des sources suivantes :
- PeopleSoft : des données ont été analysées afin d’établir un profil des ressources humaines du Programme dans chacune des régions, y compris les tendances en matière de congés utilisés, d’embauche et de roulement.
- iCase : des données de gestion de dossiers ont été examinées afin de recueillir de l’information sur les dossiers des CTC et la comptabilisation du temps.
- Système intégré de gestion financière du SAP : des données financières sur les salaires et les dépenses de F et E du Programme ont été analysées.
- Examen de dossiers : un examen des dossiers avec victimes participantes a été effectué pour étudier les formulaires liés à la CCDV. L’objectif était de recueillir des données sur les services fournis aux victimes et sur le respect des obligations liées à la CCDV. L’examen a permis de relever un total de 23 044 dossiers comportant des victimes participantes dans iCase, parmi lesquels un échantillon de 377 dossiers a été sélectionné au hasard. Le nombre de dossiers sélectionnés pour chaque bureau était le suivant : 193 pour le BRN, 120 pour le BRTNO, et 64 pour le BRY. L’examen a porté uniquement sur les dossiers qui étaient disponibles dans iCase et non sur les dossiers papier.
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